Le silence est le noviciat de la prière

Aujourd’hui, la liturgie nous donne de célébrer la fête de deux apôtres souvent discrets, Simon et Jude. La seule chose que nous savons d'eux est qu'ils font partie d'un groupe, réuni par Jésus après une nuit de prière, caractérisé par une diversité véritablement étonnante. Aucun de nous n'aurait pu réunir des personnes aussi diverses : des intellectuels comme Jean avec des pêcheurs comme Pierre ; des pécheurs publics comme Matthieu avec des personnes craignant Dieu comme Barthélemy ; des conservateurs comme Jacques avec des « aspirants terroristes » comme Simon le Zélote. Ces personnes ont réellement existé ; elles avaient un visage, une histoire, un caractère, des choix politiques…Simon l’un des Apôtres dont c’est la fête aujourd’hui il était un zélote, un homme violent qui cependant deviendra un saint. En effet Simon sera transpercé par la douceur et la soumission du Maître, il comprendra que l'amour est plus fort et plus dévastateur.

L'Église est donc une maison où les différences de chacun ne sont pas un obstacle à la vie et au cheminement ensemble, mais plutôt une richesse qui révèle encore davantage, comme dans une polyphonie harmonieuse, la beauté de la convivialité des différences. Saint Paul, nous dit dans la première lecture que nous sommes aussi des pierres vivantes pour la construction de l’Église. Pour une construction, les diverses pierres ou briques doivent s’ajuster les unes aux autres. Demandons-nous : est-ce que différents les uns des autres, nous pouvons travailler ENSEMBRE pour la construction de notre maison commune, l’Église ?

Dans l’imminence du choix des Douze Apôtres, Luc dit que Jésus prie. il aurait pu se contenter de réfléchir seul ou de choisir selon les qualités humaines de chacun. Mais non ! Il se met à l'écoute du Père avant d'agir. Il entre dans le silence, car le silence est le noviciat de la prière.  il cherche la volonté de Dieu, non la sienne. C'est une leçon profonde pour nous qui prenons souvent nos décisions dans la précipitation guidée par nos émotions ou nos désirs immédiats. Jésus lui nous montre une autre voie, celle de la prière avant l'action.

Luc souligne aussi la durée de la prière de Jésus : toute la nuit ! Cela doit fait dire une question en nous : et moi, comment je prie ? Comment prions-nous ? Combien de temps nous consacrons à notre relation avec Dieu ?  7 ou 8 h de sommeil ! 8h de travail ! Pour la prière, que chacun ajoute le temps qu’il y met !

Toute une nuit ! En général, pour nous, cela garantit un résultat sûr, opérant. Ce n’est pas ce qui apparait dans la suite de l’évangile. Les disciples appelés sont terriblement différents, voire opposés à certains moments. Leurs lâchetés ou leurs ambitions personnelles ne nous sont pas cachées. Alors, quel est le contenu de cette nuit de prière, de ce long dialogue de Jésus avec son Père ? Établir en Dieu la confiance et l’amour suffisants pour accompagner les disciples jusqu’au bout ? Prier pour chacun d’eux et pour leur unité, leurs relations réciproques ? Sans doute. A la lumière de la suite des évangiles, cette prière de Jésus cherche à établir durablement la confiance en ceux qu’il va appeler, à établir cet amour sûr qui pourra les faire grandir. Cela nous interroge sur le contenu de nos prières. Cherchons-nous l’efficacité ? La sainteté ? Et si nous cherchions tout simplement à aimer dans nos actes, à faire confiance ?

Chers frères et sœurs, éduquons-nous à une relation intense avec Dieu, à une prière qui ne soit pas occasionnelle, mais constante, pleine de confiance, capable d’éclairer notre vie, comme nous l’enseigne Jésus. Et demandons-Lui de pouvoir communiquer aux personnes qui nous sont proches, à ceux que nous rencontrons sur notre route, la joie de la rencontre avec le Seigneur, lumière pour notre existence. St Simon et St Jude, priez pour nous ! 

Père Jacques Mahougnon AGOSSOU, Vicaire à la paroisse St-Pierre-et-St-Paul de Pointe-à-Pitre